Au Burkina Faso, une nouvelle attaque djihadiste tue 35 civils – Le Figaro

Le Burkina Faso s’enfonce dans la violence djihadiste. Trente-cinq civils, dont 31 femmes, ont été tués mardi dans une attaque à Arbinda, dans le nord du pays, une des plus meurtrières de l’histoire du pays, dont les autorités ont décrété 48 heures de deuil national. La nouvelle a été annoncée par le président burkinabé Roch Kaboré en personne sur son compte Twitter. «Une attaque barbare», a déploré le chef de l’État burkinabé, à qui a souvent été reproché son manque de poigne face aux groupes djihadistes.

Outre quatre soldats et trois gendarmes qui ont également péri, «80 terroristes ont été neutralisés», selon Roch Kaboré et l’état-major des armées burkinabées. Ils avaient attaqué simultanément mardi matin un détachement militaire et des civils à Arbinda, dans la province du Soum. L’attaque «d’une rare intensité», selon l’armée burkinabée, a duré «plusieurs heures», et dans leur fuite, selon le porte-parole du gouvernement, «les terroristes ont lâchement assassiné 35 civils et blessé 6 personnes». Quelques heures plus tard, dans la soirée du mardi 24 décembre, une dizaine de militaires burkinabés aurait été tués dans une attaque à Hallalé, à quelques kilomètres de là.

De plus en plus d’attaques

Depuis 2015, les attaques djihadistes se sont multipliées dans ce pays pauvre d’Afrique de l’Ouest, tout comme chez ses voisins le Niger et le Mali. Début novembre, 38 employés d’une société minière avaient été massacrés lors de l’attaque de leur convoi dans l’est du Burkina. Ces attaques, qui frappent surtout le nord et l’est du pays, ont fait plus de 700 morts, selon un décompte de l’AFP. Elles ont fait également 560.000 déplacés et réfugiés, selon les Nations unies. Le bilan était, en février dernier, de 87.000 déplacés. Les djihadistes commencent par répandre la peur dans les villages, du Soum notamment, avant de liquider ceux qui n’ont pas voulu partir.

Rarement revendiquées, ces attaques, qui ont également visé à trois reprises la capitale, Ouagadougou, sont attribuées à des groupes djihadistes, certains affiliés à al-Qaida, d’autres au groupe État islamique. Phénomène inquiétant: les opérations djihadistes sont désormais massives et de mieux en mieux organisées. Mardi, les soldats burkinabés ont récupéré une centaine de motos, de l’armement et des munitions en grande quantité. Face aux djihadistes, les forces de l’ordre, sous-équipées et sous-entraînées, paraissent incapables d’enrayer les violences. «Dans le premier cercle de ces forces, il y a du bon, confie au Figaro un expert militaire français, familier du Sahel, mais les autres manquent terriblement de moyens.»

Après cinq ans d’opération “Barkhane” au Sahel, c’est une nouvelle preuve que la situation se dégrade encore

Un expert militaire français

Depuis deux mois, pourtant, les forces burkinabées affirment avoir mené avec succès plusieurs opérations antiterroristes aux termes desquelles une centaine de djihadistes auraient été tués. Un bilan impossible à confirmer de source indépendante.

«Après cinq ans d’opération “Barkhane” au Sahel, c’est une nouvelle preuve que la situation se dégrade encore», constate l’expert militaire. On estime généralement qu’un tiers du Burkina Faso est désormais contrôlé par des groupes djihadistes, essentiellement dans le nord, l’est et dans certaines poches au sud. Ils ne seraient pourtant pas très nombreux. «Deux mille gars éparpillés à moto et en 4 × 4», selon l’expert militaire. Mais ils sont très mobiles et s’adaptent au terrain local pour recruter, interdisant par exemple à certains endroits la coupe du bois et l’autorisant à d’autres. Longtemps vu comme un rempart pour contenir l’avancée des milices islamistes qui gangrènent le Mali voisin, le Burkina montre d’inquiétants signes de faiblesse. La progression djihadiste est plus rapide que ce qui était généralement redouté. Et le cancer s’enracine dans la société, les chefs coutumiers étant, par exemple, de moins en moins écoutés.

Au Burkina, comme souvent ailleurs, le djihadisme prospère sur la pauvreté, la corruption et le banditisme ainsi que sur l’absence de l’État dans certaines régions ou la revanche que certains déshérités veulent prendre sur celui-ci. Après avoir longtemps rejeté sur l’extérieur la montée de la violence, les autorités burkinabées ont fini par admettre des racines endogènes au djihadisme local. Face à la montée du danger, cinq États sahéliens (Burkina, Mali, Niger, Mauritanie et Tchad) ont appelé la communauté internationale à les soutenir davantage. Objectif: éviter l’effondrement de l’État burkinabé, comme ce fut le cas au Mali en 2012.

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *