Attraper le Covid-19 deux fois ? Le mystère s’épaissit autour de l’immunisation – Le Parisien

« Je n’en sais malheureusement pas plus que mes collègues ». La réponse de cet expert scientifique joint ce jeudi après-midi résume la situation. Aujourd’hui, la communauté internationale se creuse la tête afin d’obtenir une réponse essentielle pour la gestion de la crise sanitaire créée par le coronavirus : un patient déclaré positif au Covid-19 et guéri est-il immunisé et donc protégé d’une nouvelle infection? Pour l’heure, aucune certitude n’existe et, en France comme à l’étranger, spécialistes et responsables politiques font désormais part de leurs doutes.

Mercredi, au cours d’une audition devant le Sénat, Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique qui conseille notamment Emmanuel Macron, s’est montré transparent : « On se pose la question de savoir si on n’est pas en train de se tromper complètement en disant que séropositif au Covid-19 est égal à être protégé. Une série d’éléments suggère qu’un réservoir existe peut-être et que des phénomènes de réactivation peuvent arriver. Nous ne savons pas si le fait d’avoir des anticorps est un élément absolu de protection. Et on ne va pas résoudre cela tout de suite ».

De nombreuses inconnues

Plus tôt dans la semaine, l’Organisation mondiale de la santé (OMS), par la voix de Mike Ryan, directeur des programmes d’urgence, avait également fait part de cette observation : « Nous ne savons pas. Nous pouvons seulement extrapoler à partir d’autres coronavirus et, même pour eux, les données sont limitées ». Dans l’exemple du SARS-CoV, un coronavirus qui a fait près de 800 morts au début des années 2000, les patients guéris étaient protégés en moyenne « deux à trois ans », selon le professeur François Balloux, du University College de Londres.

En ce qui concerne le SARS-CoV-2, le virus qui entraîne la maladie Covid-19, des travaux sont en cours, notamment en Asie, premier foyer de la pandémie. Une étude réalisée sur 175 patients guéris à Shanghai (Chine), publiée début avril, montre que la grande majorité a développé des anticorps neutralisants. Mais ceux-ci sont-ils réellement efficaces dans la durée ? La réponse reste inconnue.

Dans cet océan de recherches et de doutes, la cheffe de la diplomatie sud-coréenne a mis en garde en affirmant à France 24 que des malades guéris du Covid-19 « ont été testés positifs quelques jours plus tard ». S’agissait-il de patients pas encore totalement guéris ou de faux positifs? Là aussi, mystère. Autant d’éléments à éclaircir qui retardent les décisions politiques et interrogent quant à la suite à donner aux mesures, comme le confinement imposé aux Français.

Lors d’un point presse accordé mercredi, Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé, a appelé à la « modestie » face à ce virus. En vue d’une possible sortie de confinement, la France a notamment prévu un grand plan de tests sérologiques. Ces prélèvements sanguins permettront de mesurer l’impact de l’infection à grande échelle grâce à la détection d’anticorps.

« Elément-clé » du déconfinement

Mais, s’interroge Olivier Véran, « est-ce qu’on développe à chaque fois des anticorps ou uniquement dans les formes les plus graves ? Deuxièmement, combien de temps après l’apparition du virus apparaissent ces anticorps ? C’est important car […] si la sérologie est effectuée trop tôt, on ne trouvera pas les anticorps et ça ne dira rien de la mémoire immunitaire ».

Cette mémoire permet à chacun de lutter contre une infection ultérieure. Elle est vitale pour l’objectif d’immunité collective, ce phénomène qui enraye naturellement une pandémie. À ce jour, la France compterait un maximum 10 à 12 % de personnes potentiellement immunisées, selon Jean-François Delfraissy.

Pour atteindre l’immunité collective, il faudrait un total théorique dépassant les 40 à 60 % de la population. Une donnée qualifiée « d’élément clé du déconfinement » par Sibeth Ndiaye, porte-parole du gouvernement le 9 avril dernier. Mais celle-ci ne sera obtenue qu’en présence de certitudes quant au développement de l’immunisation, et de son maintien dans le temps. Olivier Véran a conclu mercredi : « Nous aurons les réponses à ces questions mais lorsque suffisamment de temps sera passé ».

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