Attentat de Nice : François Molins reconnaît des prélèvements d’organes injustifiés – Le HuffPost

Au procès de l’attentat de Nice, l’ancien procureur antiterroriste François Molins a déploré les « excès de zèle » de certains médecins légistes ayant prélevé des organes sur certaines des victimes de Mohamed Lahouaiej-Bouhlel (photo d’archive prise en novembre 2015 à Paris).
Geoffroy Van der Hasselt / Anadolu Agency / Getty Images Au procès de l’attentat de Nice, l’ancien procureur antiterroriste François Molins a déploré les « excès de zèle » de certains médecins légistes ayant prélevé des organes sur certaines des victimes de Mohamed Lahouaiej-Bouhlel (photo d’archive prise en novembre 2015 à Paris).

Geoffroy Van der Hasselt / Anadolu Agency / Getty Images

Au procès de l’attentat de Nice, l’ancien procureur antiterroriste François Molins a déploré les « excès de zèle » de certains médecins légistes ayant prélevé des organes sur certaines des victimes de Mohamed Lahouaiej-Bouhlel (photo d’archive prise en novembre 2015 à Paris).

TERRORISME – Il regrette un « excès de zèle ». L’ancien procureur antiterroriste François Molins a estimé ce lundi 10 octobre, alors qu’il témoignait au procès de l’attentat de Nice, que le choix fait par les médecins légistes de prélever l’entièreté des organes de certaines victimes « ne se justifiait pas ». Un aveu au cours duquel il a tout de même défendu la nécessité des autopsies pour les besoins de l’enquête.

Après l’attaque du 14 juillet 2016, plusieurs familles s’étaient en effet vivement émues, constatant que des victimes avaient été dépouillées de leurs organes lors des autopsies, sans qu’elles en soient prévenues.

« Mon sentiment, c’est que le prélèvement de la totalité des viscères n’était pas indispensable », a déclaré devant la cour d’assises spéciale de Paris celui qui est aujourd’hui procureur général près la Cour de cassation, l’un des plus hauts magistrats français. « Si c’était à refaire, il n’y aurait pas eu de prélèvements systématiques », a-t-il ajouté, reconnaissant aussi des insuffisances dans l’information aux familles.

Trois critères fixés par le parquet

Après l’attaque au camion-bélier perpétrée par Mohamed Lahouaiej-Bouhlel sur la Promenade des Anglais le 14 juillet 2016, qui a fait 86 morts et plus de 450 blessés, des autopsies ont été pratiquées sur les corps de 14 victimes, dont quatre enfants, avait expliqué au début du procès l’ex-directeur de l’institut médico-légal (IML) de Nice, Gérald Quatrehomme.

François Molins, en tant que procureur de Paris alors chargé de toutes les enquêtes en matière de terrorisme, a confirmé à la barre les trois critères fixés par le parquet pour déterminer la nécessité d’une autopsie. Le premier, pour « établir scientifiquement les causes du décès » si l’examen externe du corps n’y a pas suffi. Le deuxième, lorsque la victime a eu une prise en charge médicale avant de décéder, « pour faire la part des choses » entre ce qui est dû à l’attaque et ce qui est lié à une « éventuelle négligence médicale ». Et enfin en cas de suspicion d’atteinte par balle.

« J’ai conscience que c’est un sujet douloureux pour les victimes », mais « on ordonne une autopsie non pas pour faire de la peine mais parce qu’on en a besoin », a-t-il fait valoir. Ce n’est pas parce qu’« après coup l’autopsie n’a servi à rien qu’on peut inférer qu’il ne fallait pas l’ordonner ».

Sur chaque corps autopsié, des organes ont été prélevés et placés sous scellés, au cas où des analyses complémentaires seraient nécessaires à l’enquête, avait expliqué le professeur Quatrehomme.

Des familles horrifiées

« On n’a pas abordé la question des prélèvements d’organes » au cours de la réunion de travail organisée entre les magistrats et l’IML, a assuré François Molins, expliquant s’en être remis sur ce point à l’expertise des médecins légistes.

Hormis pour certains organes qu’il est nécessaire de prélever en entier lorsqu’on veut les analyser, le protocole habituel à Paris est de « prélever un échantillon, quelques centimètres », et lorsque le parquet de Paris donne ses instructions, « on n’imagine pas que ça va être autrement », a souligné le magistrat.

La majorité des familles concernées n’ont pas été informées de ces actes et ne l’ont appris que lors de la procédure, voire à l’audience, ont rappelé à la barre de nombreuses parties civiles dans des témoignages déchirants. « Je cherche à comprendre comment le système médico-judiciaire a pu en arriver à une telle absurdité : découper ma fille de 12 ans en morceaux pour déterminer qu’elle est décédée d’un ’polytraumatisme compatible avec la percussion avec un engin à haute cinétique’. Tout ça pour ça. Mais on le savait déjà ! », avait ainsi déclaré à la barre Anne Gourvès.

En 2018, elle avait découvert « avec effroi un procès-verbal de mise sous scellés d’organes ». Au cours de son témoignage, elle avait dressé la liste effrayante des organes prélevés sur le corps de sa fille Amie : encéphale et dure-mère, cœur, foie, poumons, reins, bloc cervical, glandes surrénales, rate… Anne Gourvès a fait une demande de restitution des organes, assortie d’un test ADN qui lui a été refusé. Un document médical (qui évoque une personne de sexe féminin âgée d’une vingtaine d’années) l’a fait même douter du fait qu’il s’agissait bien de ceux de sa fille.

Pour ces cas, « je ne vois pas d’autres solutions que de faire des analyses ADN pour restituer ces organes aux familles », a déclaré François Molins, précisant qu’il s’exprimait en son nom, déclenchant quelques applaudissements dans la salle d’audience.

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