Assemblée nationale : le projet de loi de finances adopté en première lecture après le rejet d’une nouvelle motion de censure – Le Monde

Le député La France insoumise, Manuel Bompard, dans les rangs de la gauche à l’Assemblée nationale, lors de la séance de questions au gouvernement, à Paris, jeudi 3 novembre 2022.

Le projet de loi de finances (PLF) pour l’année 2023 a été adopté en première lecture, vendredi 4 novembre à l’Assemblée nationale, après le rejet d’une quatrième motion de censure déposée par les députés de La France insoumise. Le texte, défendu par les élus de gauche en réponse à l’utilisation de l’article 49.3 de la Constitution par Elisabeth Borne, mercredi, a rassemblé 188 voix de soutien – 289 étaient nécessaires pour que le gouvernement soit censuré.

La motion, défendue à la tribune par l’élu de La Réunion, Jean-Hugues Ratenon, n’avait quasiment aucune chance de recueillir la majorité absolue nécessaire, faute des voix du groupe Les Républicains (LR). « Nous ne nous associerons jamais à une motion de censure de La France insoumise, dont les idées sont à l’opposé des nôtres. Si nous le jugeons utile, le moment voulu, nous déposerons notre propre motion de censure. Mais selon nos termes », a insisté à la tribune la députée LR de l’Orne, Véronique Louwagie. Le Sénat examinera le budget de l’Etat pour l’année prochaine à partir du 17 novembre, dans sa version remodelée par le gouvernement.

Dans la partie dépenses du budget, l’exécutif a ainsi retenu des amendements portés par les députés du camp présidentiel, comme la hausse des salaires des accompagnants d’élèves handicapés ou un soutien à l’hébergement d’urgence. Il a par contre écarté les 12 milliards d’euros pour la rénovation thermique des logements ou encore les 3 milliards pour le ferroviaire, qui avaient été votés contre son avis par l’Assemblée nationale.

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Dans la partie recettes, le gouvernement a également enlevé un amendement socialiste voté, qui prévoyait un crédit d’impôt pour le reste à charge de tous les résidents en Ehpad. Il n’avait pas retenu non plus un amendement pour une taxation des « superdividendes » des grandes entreprises, proposition de son allié du Modem qui avait recueilli des soutiens des oppositions et jusqu’au sein du parti Renaissance.

« Voulons-nous vraiment d’une instabilité et d’un désordre qui ne profiteront qu’à l’extrême droite ? C’est la question que tous les républicains doivent se poser », a défendu en réponse à la motion de censure la première ministre, Elisabeth Borne, avant de poursuivre : « Nos compatriotes attendent des solutions. Elles viendront de débats constructifs, de la volonté de bâtir ensemble. »

Nouveau soutien du RN à la motion de LFI

Les « insoumis » reprochent au gouvernement son « mépris du pouvoir parlementaire » et un usage « autoritaire » du 49.3, qui permet l’adoption d’un texte sans vote. En cause : le fait que l’exécutif, privé de majorité absolue, ait écarté de nombreux amendements au budget, que les oppositions avaient réussi à faire adopter. Le gouvernement invoque, lui, un « blocage » des oppositions, et des mesures « irresponsables » votées parfois conjointement par la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) et les élus du Rassemblement national.

La tension était à son comble dans l’hémicycle, vendredi après-midi, les relations étant houleuses avec le Rassemblement national (RN) au lendemain d’un incident jugé raciste à l’encontre d’un député de La France insoumise (LFI). Les débats ont été précédés par la sanction de censure avec exclusion temporaire votée contre le député d’extrême droite Grégoire de Fournas. Ses propos jeudi – « Qu’il retourne en Afrique ! » –, jugés racistes par une large majorité de l’Hémicycle, ont provoqué un incident d’une rare ampleur à l’Assemblée. L’élu de Gironde ne pourra pas entrer dans le Palais-Bourbon pendant les quinze prochains jours de séances et son indemnité des deux prochains mois sera divisée par deux.

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La France insoumise avait pris soin de préciser dans sa motion que « notre projet et notre vision de la société nous placent en opposition frontale avec l’extrême droite ». Malgré ces profondes divergences, les députés du Rassemblement national ont décidé de soutenir le texte. « Le groupe prendra une nouvelle fois ses responsabilités et votera, au nom du peuple qui a mis ce gouvernement en minorité, la motion de censure qui nous occupe », a annoncé Laure Lavalette, élue RN du Var, avant le scrutin. Une motion « n’est pas l’approbation d’un projet politique », a-t-elle assuré.

« Je ne confonds pas La France insoumise et le Rassemblement national », a lancé Elisabeth Borne dans l’hémicycle. Mais, après l’« injure abjecte » du député RN, « les voix du RN se joindront à celles » de LFI « une fois de plus », a-t-elle déploré juste avant le vote, jugeant que « l’ambivalence insoumise atteint son paroxysme ».

Une partie des alliés de gauche du Parti communiste et Europe Ecologie-Les Verts ont aussi voté en faveur du texte, tandis que le Parti socialiste a décidé de s’abstenir. Assumant une divergence stratégique, ses députés ne s’étaient pas joints au dépôt de la motion LFI, craignant une « banalisation » de l’outil et une lassitude de l’opinion. Lundi, 22 voix des alliés de gauche avaient fait défaut lors du vote de la motion LFI sur le budget de la sécurité sociale, dont celles du patron du Parti communiste, Fabien Roussel, de la socialiste Valérie Rabault ou de l’écologiste Delphine Batho.

Le Monde avec AFP

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