Après l’effondrement à Mirepoix-sur-Tarn, on vous explique comment la circulation est réglementée sur les p… – franceinfo

En conférence de presse, le procureur de Toulouse a mis en cause le camion, qui pesait “plus de 50 tonnes” et semble être “la cause immédiate” de l’accident.

Qu’est-ce qui a provoqué l’effondrement d’un pont à Mirepoix-sur-Tarn (Haute-Garonne), causant ainsi la mort de deux personnes ? Lors d’une conférence de presse, mardi 19 novembre, le procureur de Toulouse a mis en cause le camion qui a utilisé cette voie pour traverser le Tarn, qui pesait “plus de 50 tonnes” et semble être “la cause immédiate” de l’accident.

“Une des hypothèses, c’est que le camion qui s’est engagé ait un poids supérieur au poids limité”, soit 19 tonnes, avait confirmé un peu plus tôt dans la journée la secrétaire d’Etat à la Transition écologique Emmanuelle Wargon. En attendant les conclusions des enquêtes judiciaire et technique chargées de faire la lumière sur cet accident, franceinfo revient en cinq questions sur la manière dont la circulation des poids lourds est réglementée sur les ponts.

Qui détermine le poids autorisé sur un pont ?

Tout dépend du type de route qui traverse le pont. Contacté par franceinfo, le secrétariat d’Etat chargé des Transports indique ainsi qu’il appartient au gestionnaire du pont d’évaluer les restrictions de circulation à mettre en place, puis de les transmettre à l’autorité de police. Charge à elle de prendre un arrêté pour fixer une éventuelle interdiction en fonction du poids des véhicules.

Ainsi, il appartiendra aux différentes directions interdépartementales des routes de surveiller les ponts sur lesquels passent des routes nationales, et de signaler d’éventuelles restrictions à prendre au maire (si l’ouvrage se trouve en agglomération) ou au préfet de département (si celui-ci se trouve ailleurs).

Le pont de Mirepoix-sur-Tarn étant traversé par une route départementale, c’est donc son gestionnaire, le conseil départemental de Haute-Garonne, qui a établi la limite de 19 tonnes pour les poids lourds qui souhaitaient traverser le Tarn à cette hauteur.

Comment cette limite est-elle établie ?

Tous les ponts ne possèdent pas d’interdiction de circulation au-delà d’un certain tonnage. “Sauf exception, la plupart des ouvrages construits aujourd’hui n’ont pas de limitation de charge : ils sont conçus pour supporter une circulation extrême extrapolée à partir du trafic normal”, explique à franceinfo Michel Virlogeux, ingénieur des ponts et chaussées. Ce spécialiste, qui a notamment conçu le viaduc de Millau, assure ainsi que ce pont à haubans pourrait potentiellement supporter “un embouteillage constitué uniquement de poids lourds”.

Les ponts plus anciens, comme celui de Mirepoix-sur-Tarn, dont la structure métallique date de 1931, posent davantage de problèmes. Pour établir un poids maximal autorisé, tout s’effectue à l’aide de logiciels permettant d’effectuer des calculs complexes. “L’idée va être de modéliser un camion, par exemple de 19 tonnes, en établissant les différentes charges de ses essieux”, détaille Michel Virlogeux. En déplaçant virtuellement ces charges le long du pont, les ingénieurs sont capables d’estimer précisément l’intensité de la pression que subit chaque partie de la structure. Et établir ainsi le poids maximal avec lequel un véhicule peut franchir le pont sans l’endommager.

Comment faire respecter cette limitation ?

Si certains ponts possèdent des barrières verticales matérialisant une hauteur de véhicule à ne pas dépasser avant de s’y aventurer, aucun dispositif autre que les panneaux de signalisation ne permet actuellement d’interdire l’accès d’un ouvrage à un véhicule trop lourd. De fait, un panneau placé à l’entrée du pont de Mirepoix-sur-Tarn interdisait l’accès aux véhicules de plus de 19 tonnes, et un second précisait qu’un seul poids lourd pouvait y rouler à la fois.

Des gendarmes surveillent l\'accès du pont de Mirepoix-sur-Tarn (Haute-Garonne), après son effondrement survenu lundi 18 novembre 2019.
Des gendarmes surveillent l’accès du pont de Mirepoix-sur-Tarn (Haute-Garonne), après son effondrement survenu lundi 18 novembre 2019. (MAXPPP)

“Les conducteurs sont tenus de se conformer à la signalisation de police, sinon ils engagent leur responsabilité en cas d’accident”, commente à ce sujet le secrétariat d’Etat chargé des Transports.

Existe-t-il une marge de sécurité ?

Interrogé lundi soir par franceinfo, Hervé Maurey, sénateur centriste de l’Eure et président de la mission d’information sur la sécurité des ponts, estimait “totalement invraisemblable (…) qu’un pont s’effondre simplement parce qu’il y a un véhicule trop lourd qui passe”. De fait, il est vraisemblable qu’un pont sur lequel les poids lourds de plus de 19 tonnes sont interdits puisse en réalité supporter un poids légèrement supérieur.

“Il existe en fait trois paliers d’interdiction : 19 tonnes, qui correspond à un poids lourd à deux essieux, 7 tonnes, pour un poids lourd à un essieu, ou 3,5 tonnes, pour un utilitaire”, détaille auprès de franceinfo Eric Chamard, responsable de la division entretien et exploitation de la direction interdépartementale des routes du Sud-Ouest.

Si les calculs montrent qu’au-delà de 23 tonnes, un poids lourd pourrait endommager un pont, on va se référer au palier inférieur et interdire la circulation à partir de 19 tonnes.Eric Chamardà franceinfo

Gare toutefois à ne pas jouer avec le feu au sujet de ces interdictions. “Si on va au-delà du tonnage permis, il est tout à fait possible d’endommager durablement un pont. Et si on va bien au-delà, c’est la rupture assurée !”, s’exclame un spécialiste du sujet qui préfère rester anonyme. Et d’appuyer : “Si vous attachez un poids de 300 kg à une corde faite pour en supporter 20, il ne faut pas s’étonner qu’elle pète !”

Comment l’état de ces ponts est-il surveillé ?

Trois niveaux de contrôle sont prévus. “Chaque ouvrage doit être visité au moins une fois par an par son gestionnaire. C’est un examen rapide, mais qui doit être suffisamment approfondi pour jauger l’état global du pont, détaille Eric Chamard. Tous les trois ans, une visite plus complète est organisée. On observe toutes les parties visibles, et sur la base de ce que l’on nomme un catalogue des désordres, on attribue une note à chaque partie de l’ouvrage, puis à l’ouvrage dans son ensemble.”

Ensuite, un troisième examen, encore plus approfondi, est prévu tous les 6 ans en moyenne. “Là, un bureau d’étude spécialisé intervient, et des experts observent chaque détail de l’ouvrage. Des nacelles sont utilisées pour observer toutes les parties du pont et consigner les désordres”, continue le spécialiste. C’est à cette issue que des travaux de réparation ou d’entretien peuvent être prescrits, ou que le tonnage maximum autorisé d’un pont peut être revu à la baisse après une de nouveaux calculs.

Ce n’est a priori pas cet aspect qui a posé problème à Mirepoix-sur-Tarn. L’ouvrage “a été contrôlé sous la responsabilité du département en 2017, plus une visite de contrôle en 2018. Donc les procédures étaient respectées, l’entretien, le contrôle étaient bien faits”, a ainsi réaffirmé Emmanuelle Wargon, venue lundi dans la commune endeuillée.

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