Antipiratage : l’Arcep est très réservée sur le projet de loi du gouvernement

C’est un avis très nuancé, pour ne pas dire plus. L’Autorité de régulation des communications électroniques (Arcep) s’est prononcé fin mars sur le projet de lutte contre le piratage défendu par le gouvernement. Le texte a finalement été rendu public ce lundi 12 avril. Pour rappel, la loi prévoit la fusion de la Hadopi avec le CSA pour créer une autorité de régulation de la communication audiovisuelle numérique (Arcom). Dotée de pouvoirs élargis et capable d’agir sur la télévision et sur Internet, elle est censée permettre de lutter plus efficacement contre le streaming illégal, ou encore le piratage de rencontres sportives.

« Une surveillance disproportionnée »

Dans ce nouveau cadre, les fournisseurs d’accès à internet (FAI) seraient particulièrement mis à contribution et il leur serait demandé de bloquer l’accès à certains services donnant accès à des contenus illicites. C’est là que le bat blesse selon l’Arcep : « En fonction des modalités retenues pour la mise en œuvre de ce texte, le fournisseur d’accès à internet pourrait se voir imposer une obligation de surveillance disproportionnée » .

Ainsi, le FAI serait « soumis à une obligation de blocage de tout service de communication au public en ligne donnant accès aux contenus jugés illicites par une décision de justice alors même que ne seraient transmis aux FAI que ces contenus ».

Selon l’autorité de régulation, « une telle obligation apparaît en pratique techniquement irréaliste et sa proportionnalité soulève donc de fortes interrogations (impossibilité probable dans le cas général pour le FAI d’identifier tous les cas de mise à disposition du contenu jugé illicite, limitations intrinsèques au fonctionnement du réseau du FAI, présence de trafic chiffré opaque pour le FAI). »

Plutôt qu’une obligation généralisée, l’Arcep défend plutôt l’approche du règlement européen sur l’internet ouvert en date de 2015. Le régulateur note d’ailleurs que ces dispositions pourraient ne pas être compatibles avec ce texte qui prévoit un fonctionnement plus réaliste pour les fournisseurs d’accès :

Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et la pédopornographie, a été retenu un dispositif prévoyant que les FAI sont tenus d’empêcher par tout moyen l’accès aux services qui leur sont indiqués au moyen d’une liste d’adresses électroniques qui comprend notamment les noms de domaine.

Le CSA est favorable à sa fusion avec la Hadopi

Comme l’ont noté nos confrères de NextInpact, l’Arcep étend également ses remarques aux fournisseurs de nom de domaine, aux moteurs de recherche et annuaire qui sont concernés par le projet de loi. De même, la notion de contenu illicite touche aussi les sites de streaming qui retransmettent des compétitions sportives.

La balle est maintenant dans le camp du gouvernement qui pourra choisir ou non de revoir sa copie. Le parlement va également se saisir de ce projet et nul doute que l’avis de l’Arcep sera abordé dans les discussions.

Pour rappel, le CSA s’est récemment prononcé en faveur de sa fusion avec la Hadopi. Dans un communiqué, le Conseil a toutefois tenu « à attirer l’attention du Gouvernement sur la nécessité de doter l’ARCOM des moyens nécessaires pour exercer de manière satisfaisante les missions qu’il est envisagé de lui confier ».

Pour le reste, les sages saluent le fait que « cette nouvelle autorité incarnera ainsi le nouvel élan donné à la politique de protection des droits de propriété intellectuelle et accompagnera la dynamique de transformation du secteur audiovisuel et numérique. »

À noter que la question du piratage des retransmissions sportives est également abordée dans une autre proposition de loi portée par les députés LREM. Nous avons analysé les différents enjeux et objectifs de ce texte précédemment. L’Europe suit par ailleurs ce dossier de près et certains élus veulent même que la suppression des contenus illégaux en moins de trente minutes devienne la règle.

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