Affaire Troadec : “J’ai une énorme culpabilité”, déclare Lydie Troadec au premier jour du procès – franceinfo

C’est une silhouette fluette dans le box, 52 ans mais une allure d’adolescente. Lydie Troadec, longs cheveux brun avec une frange mains croisées dans le dos, est une énigme insaisissable comme l’anguille qui se dérobe. Le procès de l’affaire Troadec s’est ouvert, mardi 22 juin, devant la Cour d’assises de Loire-Atlantique. Hubert Caouissin est jugé pour le meurtre en 2017 de sa belle-famille : les Troadec. L’accusé et sa compagne de l’époque, Lydie Troadec, également dans le box des accusés, étaient persuadés qu’un prétendu magot d’or aurait été volé par les victimes. Pour ce premier jour d’audience, elle a été interrogée sur sa personnalité.

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Lydie Troadec, qui comparaît libre, a face à elle une partie de sa famille paternelle, ses tantes et ses cousins. Ils sont là pour comprendre comment, dans le huis clos de leur couple, s’est nouée la folie meurtrière de son mari. Comment elle a pu l’aider en achetant d’immenses sacs poubelles pour transporter – elle le savait – les corps de son unique frère Pascal et de sa belle sœur et de ses neveux et nièces. Pendant plus de quatre heures, la présidente l’interroge avec tact et patience. Elle la guide vers la parole car chez les Troadec : on ne parle guère, on tait ses émotions. “Ma mère, c’est une handicapée des sentiments, raconte Lydie Troadec. Quand je pleurais petite, elle me disait : ‘Va dans ta chambre, ça va passer’”. Le père, lui, est autoritaire, parfois brutal. Sa mère est “soumise”, dit Lydie, comme elle avec Hubert.

Cette mère, Renée, qui ne s’est pas constituée partie civile alors que son fils et ses petits enfants, sa belle fille, ont été tués. “Pourquoi ?”, lui demande la présidente. “Parce qu’elle considérait qu’elle se mettait contre moi”, répond sa fille. Dans le délire paranoïaque qui a envahi Hubert Caouissin et Lydie, René Troadec a un rôle particulier. C’est elle qui a évoqué la première l’histoire des lingots d’or prétendument volés par son propre fils. Cet héritage dont l’instruction a montré qu’il n’a jamais existé. Lydie assure à la barre qu’elle n’y croit plus. “Pourquoi ce changement ? Vous qui y avez cru des années“, s’interroge la présidente. “Parce que les médias ont dit que l’or n’existait pas”, répond-elle.

La première émotion vient quand elle évoque les crises d’Hubert Caouissin au moment de son burn-out. Il ne supporte plus le moindre bruit. Parfois, devant elle et leur petit garçon, il se tape la tête contre les murs en prenant son élan. “C’est violent”, murmure en larmes Lydie Troadec. Mais ce n’est qu’à la toute fin de l’interrogatoire que la présidente réussit à lui faire exprimer une forme de compassion pour les victimes, pour les parties civiles. “J’ai mal pour eux, sanglote Lydie. J’ai une énorme culpabilité.”

“Si je m’étais rendu compte qu’Hubert était malade, il ne serait peut-être pas arrivé tout ça.”

Lydie Troadec

 

“C’est forcément très important que Mme Lydie Troadec prenne la mesure de cette histoire”, explique Cécile de Oliveira, avocate des proches de Brigitte Troadec, l’une des victimes du quadruple meurtre. “J’espère que ces trois semaines de procès vont lui permettre de réaliser le caractère abominable de ce quadruple meurtre, poursuit-elle. Je l’entendais culpabiliser tout à l’heure de ne pas avoir trouvé de travail ou de formation. Les larmes dans les box de cour d’assises sont toujours très difficiles à interpréter. Je ne vais pas faire une interprétation inutilement à charge contre madame Troadec.”

Pour Loïc Cabioch, sa cliente a beaucoup cheminé depuis le quadruple meurtre, notamment grâce à ses rendez-vous avec un psychiatre : “Ce que l’on voit à l’audience, c’est aussi le résultat des trois années d’instruction, des trois années de suivi qu’elle a eues avec un psychiatre, de la réflexion qu’elle a pu avoir par rapport aux éléments du dossier et de la prise de conscience que ça amène. Il y a de l’émotion devant les parties civiles, alors qu’on parle du décès de son frère, de sa belle sœur, de ses neveux et nièces. C’est beaucoup d’émotion pour elle aussi et l’audience a évidemment fait ressortir cela.”

Pour recel de cadavre et modification de la scène de crime, Lydie Troadec encourt trois ans de prison. Son mari, Hubert Caouissin encourt la réclusion criminelle à perpétuité.

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