Affaire Laurent Bigorgne : une peine plus légère, mais une qualification plus lourde – Le Monde

Laurent Bigorgne n’était pas là, jeudi 8 décembre, lorsque le tribunal correctionnel de Paris a rendu son jugement. L’ex-directeur de l’Institut Montaigne, un think tank libéral influent auprès de la droite, de la gauche, et notamment du chef de l’Etat, Emmanuel Macron, n’a donc pas entendu le président Eric Vivian énoncer ce jugement mi-chèvre mi-choux – « incohérent et insensé », fustige Me Sébastien Schapira, l’avocat de M. Bigorgne.

Pour avoir drogué à son insu son ancienne belle-sœur et collaboratrice Sophie Conrad, lors d’une soirée en février, ce familier des cercles du pouvoir a été condamné à douze mois d’emprisonnement avec sursis et 2 000 euros d’amende. C’est en deçà des réquisitions du parquet, qui avait demandé, le 10 novembre, dix-huit mois d’emprisonnement avec sursis et une obligation de soins. Mais le tribunal a aussi considéré que Laurent Bigorgne avait drogué la jeune femme « afin de commettre à son égard un viol ou une agression sexuelle », requalifiant ainsi les faits, alors même que le parquet n’avait pas retenu l’intention sexuelle.

« Reconnaissance complète »

Qualification plus lourde, peine plus légère, le jugement peut étonner. Sa portée a pourtant été immédiatement comprise par la plaignante qui a exprimé son soulagement après la requalification du tribunal : « C’est une reconnaissance de ce qui s’est passé et des faits, et une reconnaissance complète », a ainsi salué Sophie Conrad, après le délibéré, exprimant notamment sa satisfaction de voir retenue l’intention de commettre un viol ou une agression sexuelle.

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Pour Laurent Bigorgne, c’est justement ce qu’il voulait éviter à tout prix. Dès sa garde à vue, en février, puis lors de son procès, l’ancien numéro deux de Sciences Po avait immédiatement reconnu avoir versé de la MDMA (ecstasy) dans le verre de son ex-belle sœur. Il avait aussi confessé sa propre addiction à la cocaïne. « J’en prenais jusqu’à 4 grammes par jour », avait-il expliqué au tribunal, en décrivant en détail ses cadences de travail folles et la spirale infernale dans laquelle il avait sombré. Mais il soutenait avoir drogué celle qui était alors sa collaboratrice à l’Institut Montaigne dans le seul but « de lui parler », contestant farouchement toute intention sexuelle.

Le président du tribunal avait longuement cité les dizaines de textos à connotation sexuelle dont Laurent Bigorgne avait bombardé la jeune femme. Il avait aussi rappelé que M. Bigorgne avait précédemment drogué à son insu sa propre compagne. Avant de poser cette question simple à laquelle l’historien n’avait pas su clairement répondre : « Pourquoi, si vous avez du mal à parler, avez-vous besoin de droguer l’une ou l’autre ? »

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