Adrien Quatennens critiqué par des élus de la Nupes pour sa prise de parole médiatique au lendemain de sa condamnation – Le Monde

Adrien Quatennens à l’Assemblée nationale, à Paris, 3 août 2022.

Pour certains, l’intervention manquait au moins de « de retenue », d’autres dénoncent sans détour des propos « indignes », voire « une entreprise de blanchiment politique ». Mercredi 14 décembre, le député du Nord, Adrien Quatennens (LFI, La France insoumise), a pris la parole dans une longue interview sur BFM-TV, au lendemain de sa condamnation à quatre mois de prison avec sursis pour violences conjugales et de sa suspension de son groupe parlementaire pour la même durée.

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Comme dans un premier entretien paru le soir de l’annonce de sa peine dans La Voix du Nord, l’élu y dénonce un « lynchage médiatique » et revient longuement sur le contexte conjugal entourant, selon lui, les faits de violence pour lesquels il a été condamné : une gifle donnée à son épouse à l’automne 2021 et une rafale de SMS envoyés après leur séparation.

Tant par son contenu que par sa célérité, ce retour médiatique a été diversement apprécié par plusieurs élus de gauche, y compris au sein de la famille « insoumise ». « Quand le jour même on a une condamnation pour violences conjugales, réagir en direct dans un grand média, je trouve que ça manque de retenue », s’est étonné, jeudi, sur RTL le député François Ruffin (LFI), alors que le mouvement traverse déjà une crise interne sur fond d’accusations de verrouillage de la direction.

« Je me dois juste de réagir à la communication personnelle d’Adrien Quatennens : pas en mon nom, pas en notre nom ! », a posté en début de soirée sur son compte Twitter la députée de Paris, Sarah Legrain (LFI), tout en disant respecter les « positions collectives » de son groupe parlementaire. « Parfois il faut savoir se taire », a renchéri sa collègue « insoumise » Danielle Simonnet sur le réseau social, en insistant sur le fait qu’Adrien Quatennens s’exprime désormais « en son nom, et non en celui du groupe parlementaire ».

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« Il y a un temps pour la sanction, un temps pour la réparation »

Sandrine Rousseau, comme d’autres figures féministes de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes), a pris moins de gants pour commenter cette sortie médiatique. « On ne peut pas, le jour du jugement, commencer une réhabilitation. Il y a un temps pour la sanction, un temps pour la réparation et un temps pour la réhabilitation », a-t-elle déclaré sur LCI jeudi matin, regrettant d’assister à « une entreprise de blanchiment politique à l’instant même où le verdict a été posé ».

Au-delà du tempo choisi par le député pour se défendre médiatiquement, le fond de ses propos ne passe pas davantage. Dans un tweet posté jeudi, la députée du Puy-de-Dôme, Marianne Maximi (LFI), considère que « dévoiler le passé, l’enfance, l’intimité de la victime », « minimiser et relativiser sa propre violence », comme Adrien Quatennens le fait dans cette interview, est une « stratégie caractéristique des auteurs de violences conjugales ». « C’est grave. Cela fait du mal nos combats, contre toutes les violences faites aux femmes », tranche-t-elle.

La veille, sur BFM-TV, Raphaëlle Rémy-Leleu, élue écologiste au conseil municipal de Paris et militante féministe, estimait déjà que le député remettait « la faute sur la victime et adopt[ait] toute une série de justifications antiféministes et sexiste». « On ne peut pas se targuer d’appartenir à un mouvement de gauche et féministe et tenir des propos pareils », dénonçait-elle, jugeant « absolument indignes et insupportables » les mots prononcés par Adrien Quatennens au sujet de son ex-compagne.

Appels répétés à la démission

Loin de faire taire les appels à la démission du député du Nord, sa sortie médiatique a pour conséquence de les remettre en lumière. Comme l’élue parisienne Raphaëlle Rémy-Leleu, Sandrine Rousseau appelle une nouvelle fois Adrien Quatennens à démissionner et à « se représenter devant les électeurs », jugeant que « le contrat au nom duquel il a été élu est brisé ». S’il avait été condamné pour d’autres faits, « il y aurait eu des appels à la démission beaucoup plus larges », avait-elle déjà fustigé mercredi.

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Le secrétaire général du Parti communiste et député du Nord, Fabien Roussel, appelle indirectement l’élu à rendre son mandat. « Il a reçu une condamnation pour violences conjugales, c’est grave. (…) Nous, nous demandons aux personnes qui ont de telles condamnations de démissionner de leur mission », a-t-il argué, jeudi, sur BFM-TV.

Tout en se disant « solidaire » de la décision prise par son groupe parlementaire d’interdire à M. Quatennens de siéger dans ses rangs jusqu’au 13 avril, François Ruffin a regretté de son côté que sa suspension n’ait pas été portée à un an, comme il le souhaitait. « Je pense que finalement les grands hommes se construisent avec des traversées du désert, qu’il s’agisse du Christ ou du général de Gaulle. Pour moi, une année sabbatique n’aurait fait du mal à personne », a-t-il commenté. Et d’ajouter : « C’est au peuple de décider à la fin si jamais Adrien Quatennens a un avenir politique ou pas. »

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LFI défend la « liberté » du député Quatennens

A la tête de LFI, le soutien apporté à Adrien Quatennens demeure néanmoins intact et l’argumentaire conforme à celui avancé depuis le début de l’affaire. L’ancien dauphin de Jean-Luc Mélenchon étant suspendu du groupe parlementaire, sa décision de sortir du silence et de revenir siéger dans l’Hémicycle « lui appartient », et à lui seul. « Puisqu’il n’est plus dans notre groupe pour une durée de quatre mois, cela lui laisse la liberté à la fois de se défendre comme il l’entend et de revenir à l’Assemblée comme il l’entend », a avancé, jeudi, sur Public Sénat la présidente des députés « insoumis », Mathilde Panot. Tout en rappelant qu’Adrien Quatennens n’a pas été frappé d’une peine d’inéligibilité, l’élue du Val-de-Marne écarte pour l’heure tout départ définitif : « Demander à un élu de démissionner, ça n’existe pas. »

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