5G : les opérateurs en ordre dispersé avant l’appel d’offres fixé à septembre

5G : les opérateurs en ordre dispersé avant l'appel d'offres fixé à septembre

La décision de l’Arcep d’organiser la fin de l’appel d’offres pour l’octroi des précieuses fréquences dévolues à la 5G sur la “bande reine” des 3,5 GHz n’a pas manqué de faire réagir du côté des opérateurs. Si les directions respectives d’Orange et de Free se sont faites discrètes, prenant acte de ce nouvel épisode, ce n’est pas le cas de celles de Bouygues Telecom et SFR qui regrettent toutes deux la tenue de cet appel d’offres au mois de septembre, qu’elles auraient préféré décaler de plusieurs mois supplémentaires.

Interrogé en fin de semaine sur l’antenne de BFM Business, le directeur général de SFR, Grégory Rabuel, a ainsi affirmé qu’il serait très attentif au déroulement de cet appel d’offres et aux conditions de commercialisation de la nouvelle génération de technologie sans fil. Si celui-ci s’est dit « content d’avoir un calendrier car on a besoin d’avoir de la prévisibilité en tant qu’opérateur », il a toutefois exigé des autorités qu’elles opèrent « une clarification de ce que sont la vraie 5G et la fausse 5G ».

Avant de s’en prendre à Free, qui pourrait selon lui être tenté de commercialiser des offres 5G sur la bande des 700 MHz – performante sur la couverture géographique mais disposant d’un faible débit – et non sur celle des 3,5 GHz, qui offre le meilleur compromis entre débit et portée du signal. « Vous pouvez déployez la 5G dans la bande des 3,5 GHz, ce qui va apporter au Français du débit tout de suite, mais d’autres opérateurs pourraient avoir l’intention de déployer la 5G dans d’autres bandes de fréquence, dites 700, ce qui signifie que vous aurez bien écrit 5G sur votre téléphone mais qu’il n’y aura aucun bénéfice pour les consommateurs puisque cela sera parfois pire que de la 4G », a-t-il dénoncé.

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Priorité à la 4G pour Bouygues Telecom et SFR

A l’instar de l’état-major de Bouygues Telecom, ce dernier a également souhaité que la 5G fasse partie d’un débat plus global « sur le déploiement de la 4G, de la fibre et de la 5G car jusque-là les sujets étaient scindés ». Auditionné quelques jours auparavant au Sénat, le PDG du groupe Bouygues, Martin Bouygues, avait déjà lancé un pavé dans la mare en demandant une refonte du New Deal Mobile permettant de faire baisser la facture de la 5G – qui pourrait rapporter au bas mot 2,17 milliards d’euros à Bercy – en réorientant une partie de cette manne dans le déploiement de 1 500 à 2 000 sites 4G mutualisés en zone rurale.

Le PDG l’avait assuré, « retarder les enchères 5G de cinq ou six mois ne pose aucun problème pour la compétitivité de l’économie française », qui a avant tout besoin d’une couverture 4G performante sur l’ensemble du territoire. Pas de problème donc pour ce dernier, qui a enfoncé le clou en estimant que « ce n’est qu’à partir de 2023 que la maturité de la 5G et l’arrivée d’une seconde phase d’équipement permettra d’envisager de nouveaux usages, notamment industriels, grâce à des débits élevés et de plus faibles taux de latence ».

Après avoir fait maintes fois la promotion de la nouvelle technologie mobile, l’état-major de Bouygues Telecom semble aujourd’hui moins sûr de son fait. « La 5G apportera des innovations formidables, notamment pour les entreprises. Mais elles n’arriveront pas avant 2023. Profitons des quelques mois que nous demandons pour accélérer la couverture 4G du territoire. Ajoutons des antennes où c’est nécessaire », préconisait il y a de cela quelques semaines le directeur général adjoint de l’opérateur Didier Casas, alors même que la France a d’ores et déjà pris du retard sur ses voisins en ce qui concerne cette nouvelle technologie.

L’ombre de Huawei

Si elle s’est finalement révélée infructueuse, la campagne de lobbying médiatique orchestrée par les directions de Bouygues Telecom et SFR ne devrait pas s’arrêter de sitôt. Car outre la question des financements, les critiques des deux opérateurs portent également sur la gestion du “cas Huawei” par les autorités, alors que le constructeur chinois est un partenaire industriel majeur de Bouygues Telecom et SFR mais fait l’objet d’une attention soutenue de la part des autorités. Le tout sur fond d’embargo américain et de soupçons de collusion avec le régime chinois.

Alors que 50 % du réseau déployé par SFR s’appuie sur la technologie développée par la firme de Shenzhen, l’opérateur a estimé qu’interdire ou limiter l’usage de la technologie du constructeur aura un coût qu’il n’entend pas assumer. « Les choses sont claires : nous avions des règles du jeu, à savoir que nous pouvions déployer nos réseaux mobiles avec Huawei, et si l’on change les règles du jeu, nous devons être accompagnées dans les conséquences de ce changement », a ainsi fait savoir Grégory Rabuel. Une position partagée par l’état-major de Bouygues Telecom.

Et de rappeler qu’aux « Etats-Unis, Donald Trump a décidé de faire interdire les équipementiers chinois et a accompagné les opérateurs qui travaillaient avec eux pour les aider dans leur transition ». Pour rappel, si la situation de la firme de Shenzhen s’avère précaire dans de nombreux pays, y compris chez nos voisins britanniques, ce n’est pas forcément le cas en France. Si le constructeur devrait bien bénéficier d’un régime d’exception au regard des soupçons qui pèsent sur lui, il devrait toutefois être autorisé à participer au déploiement des futurs réseaux mobiles.

Mais seulement pour les parties non sensibles du réseau, comme les antennes, considérées comme posant moins de risques en termes de sécurité, ce qui a son importance. Du moins pour Bouygues Telecom et SFR, qui semblent bien décidés à faire entendre leurs voix au gouvernement au sujet de cette affaire qui risque encore de beaucoup faire parler avant la fin de l’appel d’offres 5G.

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